« Toilettes accueillantes »
Pipi, où je veux quand je veux ?
Jeanneke Pis © Wikicommons
3 questions à Zoubida Jellab,
échevine de la ville de Bruxelles à la propreté publique et aux espaces verts
Février 2022 ◊ Par Mathilde ◊ lire, entretien, dossier#3À Bruxelles, comme dans beaucoup de villes, avoir une envie pressante quand on est dans l’espace public, peut vite devenir un casse-tête, surtout quand on est une femme, tandis que les hommes trouvent plus facilement comment se soulager. Bientôt, plusieurs solutions devraient être mises en place pour remédier à cette discrimination.
Cependant, ce n’est pas toujours facile de créer de nouvelles toilettes. Il faut trouver l’espace pour les installer, le voisinage n’est pas toujours content. C'était aussi important de réfléchir à des lieux qui soient propres et agréables, nettoyés deux fois par jour, parce que des toilettes sales, il n’y a personne qui y va, on préfère encore aller derrière un arbre ou entre deux voitures.
L’idée donc, c'est de transformer les urinoirs en toilettes, en plus de la création de nouvelles toilettes. Il y aura bientôt huit nouvelles toilettes, dont deux dans les parcs sous forme de toilettes sèches. Il fallait aussi voir qu’il y avait une discrimination financière : les WC fermés, qui s’adressent plus aux femmes, sont payants, mais tout le monde n’a pas toujours une petite pièce, donc la ville va les rendre gratuits.
Mais même comme ça, ça ne sera jamais suffisant et aussi parce ça demande évidemment un budget. Du coup, nous allons développer un réseau de « toilettes accueillantes » avec l'Horeca, les centres culturels et tous les acteurs qui ont envie de nous soutenir. Comme cela, on peut multiplier le nombre d'accès pour tout le monde. Les bars et les restaurants partenaires vont recevoir une subvention de 1.000 euros par an (pour l’achat de papier, de produits d’entretien et pour la main d’œuvre), on leur fera signer une convention d’engagement, pour qu’ils accueillent tout le monde, sans discrimination, y compris les personnes sans-abris. Nous sommes en train d’identifier tous ces lieux, qui doivent aussi être bien répartis sur le territoire. Il y en aura une cinquantaine et chacun aura un autocollant à poser sur la vitrine pour indiquer que leurs toilettes font partie de ce réseau.
De manière générale, la question de la discrimination de genre dans l’espace urbain est de plus en plus présente dans le débat public. Concrètement, le conseil communal a voté en novembre 2020 un nouveau plan d’action, puis une motion, pour que soit mieux pris en compte le bien-être des femmes dans la ville. Des recommandations ont été données à l'ensemble des services pour l’améliorer.
On voit qu’il y a effectivement une réflexion collective, de différentes associations, et nous, nous sommes là pour exécuter les demandes, parce qu'il y a de plus en plus de revendications des citoyennes qui sont légitimes. Par exemple, on va adhérer à une application, Peesy, qui sert à répertorier les adresses accessibles. C'est une application qui a été lancée par quatre jeunes femmes. Elles sont venues nous voir et tout de suite on s’est dit qu’on pourrait collaborer plutôt que de créer notre service de géolocalisation, puisque ça existait déjà.
D’autres villes mènent aussi ces réflexions. Par exemple, on va installer des « uritrottoirs », qui sont faciles à installer et à enlever et qui peuvent cibler des endroits avec beaucoup d’affluence. On a vu que ça se développait en France et que ça peut être aussi une solution adaptable et qui répond aux problèmes de sécurité ou des plaintes des riverains, à cause des « pipis sauvages ».
Quels sont les autres problèmes liés à l’usage de l’espace public et de ses services par les femmes ?
Il y a, je l’ai dit, la question de la propreté. Car oui, c’est important pour les utilisatrices et aussi les enfants, il ne faut pas oublier les enfants. Donc, il faut faire plus d’efforts pour améliorer le passage des services de propreté, mais aussi évaluer les « toilettes accueillantes », si les responsables jouent bien le jeu – y compris en termes d’accès à tous les publics.
Et d’un autre côté, c’est la question de la sécurité. On sait que parfois, les cabines fermées ne sont pas très rassurantes. Donc ça, ce n’est pas évident. Mais là aussi, on aura une évaluation régulière et des retours du terrain. Comment on peut se déplacer dans la ville en toute sécurité et avoir accès aux mêmes services que les hommes, c’est vraiment important. On est très attentif·ve·s à cela.
On va aussi travailler la question dans les espaces verts. Par exemple, s’assurer qu’il n’y ait pas des zones, cachées des regards par des haies par exemple, qui favorisent le harcèlement. Là aussi les femmes doivent pouvoir se sentir aussi bien que les hommes ; pour les terrains sportifs en extérieur et les plaines de jeu, il y a aussi des réflexions à mener pour en faire des endroits qui répondent mieux à ce que recherchent les filles.
Que peut faire la commune de Bruxelles face au problème du manque de toilettes publiques ?
Quand on a commencé à évaluer la situation au début de la mandature [en 2018, ndlr], on a compté 29 urinoirs, pour seulement 9 toilettes accessibles aux femmes et aux handicapé.e.s. On s’est dit qu’il y avait là une discrimination claire. C’est un constat qu’on ne connaît pas seulement sur le territoire de la ville de Bruxelles, mais qu’on connaît aussi ailleurs. Quand il y a une inégalité, il faut la rectifier.Cependant, ce n’est pas toujours facile de créer de nouvelles toilettes. Il faut trouver l’espace pour les installer, le voisinage n’est pas toujours content. C'était aussi important de réfléchir à des lieux qui soient propres et agréables, nettoyés deux fois par jour, parce que des toilettes sales, il n’y a personne qui y va, on préfère encore aller derrière un arbre ou entre deux voitures.
L’idée donc, c'est de transformer les urinoirs en toilettes, en plus de la création de nouvelles toilettes. Il y aura bientôt huit nouvelles toilettes, dont deux dans les parcs sous forme de toilettes sèches. Il fallait aussi voir qu’il y avait une discrimination financière : les WC fermés, qui s’adressent plus aux femmes, sont payants, mais tout le monde n’a pas toujours une petite pièce, donc la ville va les rendre gratuits.
Mais même comme ça, ça ne sera jamais suffisant et aussi parce ça demande évidemment un budget. Du coup, nous allons développer un réseau de « toilettes accueillantes » avec l'Horeca, les centres culturels et tous les acteurs qui ont envie de nous soutenir. Comme cela, on peut multiplier le nombre d'accès pour tout le monde. Les bars et les restaurants partenaires vont recevoir une subvention de 1.000 euros par an (pour l’achat de papier, de produits d’entretien et pour la main d’œuvre), on leur fera signer une convention d’engagement, pour qu’ils accueillent tout le monde, sans discrimination, y compris les personnes sans-abris. Nous sommes en train d’identifier tous ces lieux, qui doivent aussi être bien répartis sur le territoire. Il y en aura une cinquantaine et chacun aura un autocollant à poser sur la vitrine pour indiquer que leurs toilettes font partie de ce réseau.
Le problème n’est pas nouveau, pourquoi les choses changent-elles maintenant ?
Il y a en effet plusieurs études qui ont été menées et des demandes de citoyens et de citoyennes qui nous remontent. Avec la fermeture de nombreux lieux pendant les confinements, le problème s'est accentué.De manière générale, la question de la discrimination de genre dans l’espace urbain est de plus en plus présente dans le débat public. Concrètement, le conseil communal a voté en novembre 2020 un nouveau plan d’action, puis une motion, pour que soit mieux pris en compte le bien-être des femmes dans la ville. Des recommandations ont été données à l'ensemble des services pour l’améliorer.
On voit qu’il y a effectivement une réflexion collective, de différentes associations, et nous, nous sommes là pour exécuter les demandes, parce qu'il y a de plus en plus de revendications des citoyennes qui sont légitimes. Par exemple, on va adhérer à une application, Peesy, qui sert à répertorier les adresses accessibles. C'est une application qui a été lancée par quatre jeunes femmes. Elles sont venues nous voir et tout de suite on s’est dit qu’on pourrait collaborer plutôt que de créer notre service de géolocalisation, puisque ça existait déjà.
D’autres villes mènent aussi ces réflexions. Par exemple, on va installer des « uritrottoirs », qui sont faciles à installer et à enlever et qui peuvent cibler des endroits avec beaucoup d’affluence. On a vu que ça se développait en France et que ça peut être aussi une solution adaptable et qui répond aux problèmes de sécurité ou des plaintes des riverains, à cause des « pipis sauvages ».
Quels sont les autres problèmes liés à l’usage de l’espace public et de ses services par les femmes ?
Il y a, je l’ai dit, la question de la propreté. Car oui, c’est important pour les utilisatrices et aussi les enfants, il ne faut pas oublier les enfants. Donc, il faut faire plus d’efforts pour améliorer le passage des services de propreté, mais aussi évaluer les « toilettes accueillantes », si les responsables jouent bien le jeu – y compris en termes d’accès à tous les publics.Et d’un autre côté, c’est la question de la sécurité. On sait que parfois, les cabines fermées ne sont pas très rassurantes. Donc ça, ce n’est pas évident. Mais là aussi, on aura une évaluation régulière et des retours du terrain. Comment on peut se déplacer dans la ville en toute sécurité et avoir accès aux mêmes services que les hommes, c’est vraiment important. On est très attentif·ve·s à cela.
On va aussi travailler la question dans les espaces verts. Par exemple, s’assurer qu’il n’y ait pas des zones, cachées des regards par des haies par exemple, qui favorisent le harcèlement. Là aussi les femmes doivent pouvoir se sentir aussi bien que les hommes ; pour les terrains sportifs en extérieur et les plaines de jeu, il y a aussi des réflexions à mener pour en faire des endroits qui répondent mieux à ce que recherchent les filles.