Un billet d’avion solo


Au travers d’un objet, iels vous raconte leur éveil féministe.

Janvier 2021 ◊ lire, objet, opinion ◊ Par Mathilde


Il m’aura fallu attendre d’avoir 27 ans pour voyager pour la première fois toute seule. Auparavant, je m’arrangeais toujours pour trouver un ou une compagnon(ne) de route. Un jour, une amie plus âgée m’a dit « tu verras, une fois que tu auras sauté le pas du voyage en solo, tu auras envie de le refaire, encore et encore ». Pour nous, les femmes, il est beaucoup plus difficile que pour les hommes de s’imaginer à l’autre bout du monde, seule avec son sac à dos. On est bien plus souvent assaillies par la crainte d’avoir une mauvaise rencontre ou d’être abusée par une personne malveillante qui s’imagine une femme comme faible. 

Renoncer à un voyage, car personne sous la main pour m’accompagner ? C’est dommage, non ?

Avec le temps, on se retrouve avec une double problématique : à cause de nos vies professionnelles, mes amis et moi avions du mal à nous accorder sur les dates de vacances… et moi, j’avais le temps, plus d’argent car je gagnais ma vie et surtout l’envie de voyager. Le « p’tit trip » en solo s’est donc un peu imposé comme une évidence.

Et effectivement, une fois qu’on a surmonté l’obstacle psychologique, voyager en solo est un moyen sans pareil d’émancipation pour les femmes. C’est une leçon de vie qui nous apprend à être indépendantes en faisant nos propres choix, à suivre nos propres envies, à prendre confiance en nous (et aussi dans les autres), à aiguiser nos sens dans les situations qu’on rencontre, sans être exposée au jugement de notre entourage. En somme, ça nous apprend à être la seule maîtresse à bord, dans un environnement en quelque sorte « neutre », car loin de ce qui a tendance à nous influencer (nos parents, nos copains, nos amis…).

J’ai appris de mes voyages des choses qui me servent maintenant dans la vie : je sais que je peux me débrouiller seule, sans m’appuyer sur mes parents ou mon copain, j’écoute (et surtout je suis) mon instinct et mes envies, j’ai baissé mes barrières de défense a priori envers les autres, notamment envers les hommes. Tout cela m’a donné l’envie de tenter une autre aventure, qui elle aussi ne me tentait pas avant, par manque de confiance ou parce que je ne me connaissais pas assez moi-même. À 30 ans, j’ai aussi sauté le pas d’habiter toute seule. Et je ne le regrette pas, car le/la seul.e compagnon.ne qui nous accompagnera toujours partout, c’est soi-même.


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